Après une reprise de l’activité au cours de l’été, la joie fut de courte durée pour ceux qui avaient retrouvé le chemin des cuisines, des salles et des terrasses.
Toujours aussi pesante sur le secteur de la restauration, l’ombre du coronavirus plane sur les propriétaires d’établissements qui ont constaté, avec tristesse, l’augmentation du nombre de cas de covid-19 sur l’ensemble de l’hexagone à partir du mois d’août. Alors que certaines régions, comme la Nouvelle-Aquitaine et la Provence-Alpes-Côte d’Azur, étaient encore peu touchées, elles sont désormais frappées de plein fouet par l’épidémie. Résultat le nombre de cas continue inexorablement d’augmenter. Véritables vecteurs de liens sociaux, cafés, hôtels et restaurants subissent, de nouveau, des fermetures.
Des craintes justifiées, qui se sont malheureusement muées en réalité puisque plusieurs préfectures ont mis en place des mesures sanitaires pour faire face à la recrudescence de l’épidémie. A Bordeaux ou encore à Marseille, des arrêtés préfectoraux obligeaient, jusqu’au 22 septembre, les bars et les restaurants à fermer à 23h00 en plus du port du masque obligatoire dans toute la ville. Il était alors interdit de consommer debout, un vrai coup dur pour les propriétaires de débits de boisson qui avaient moins soufferts jusque-là contrairement à leurs homologues de la restauration. Des mesures déjà devenues obsolètes puisque le 23 septembre, le gouvernement, par l’intermédiaire d’Olivier Véran, Ministre des Solidarités et de la Santé, a annoncé la fermeture totale des bars et des restaurants à Marseille ! Une décision incompréhensible pour les professionnels du secteur représentés par Bernard Marty, Président Général de l’UMIH (l’Union des métiers et des industries de l’Hôtellerie-Restauration) :
« Les mesures sont brutales, imprécises et n’ont fait l’objet d’aucune concertation. J’ai demandé au préfet Christophe Mirmand des explications. Les mesures s’appliquent-elles à compter de samedi (26 septembre) ou de lundi (28 septembre)? Sur quel territoire géographique exactement ? Jusqu’à quand ? Quelles mesures vont être prises pour nous soutenir ? Il est clair que nous sommes montrés du doigt et que la réaction des professionnels va être sévère. Donc nous attendons des réponses, à commencer de la date exacte d’entrée en vigueur. Après, nous agirons »
Le monde de la restauration consterné
Les nouvelles mesures du 23 septembre ont été accueillies avec colère par les professionnels de la restauration qui ont le sentiment d’être punis comme le confiait Frédéric Jeanjean, président de l’UMIH des Bouches-du-Rhône, au journal « La Provence » :
« Non, mais vous vous rendez compte ? Nous sommes une nouvelle fois pointés du doigt. Comme si on était responsable de ce qui se passe. Comme si nous étions la peste de 1720 et qu’à Marseille on jette les cadavres par les fenêtres. Mais les morts, c’est parmi nous qu’ils vont être très bientôt si nous devons fermer une nouvelle fois »
Des propos corroborés par le chef le plus connu de France : Philippe Etchebest. Figure de la gastronomie française, ce chef, étoilé par le célèbre Guide Michelin, est devenu le porte-parole des restaurateurs auprès des médias et du gouvernement pendant le confinement. Il s’était entretenu, par visioconférence, avec le Président de la République Emmanuel Macron à la fin du mois d’avril. Lors de cette réunion, il avait demandé l’appui des assurances. Cinq mois plus tard, la réponse du gouvernement est toujours attendue :
« On n’a pas vraiment eu de réponse de l’État. On a été écoutés, mais on n’a pas été entendus. Il y a le chômage partiel certes, mais il était indispensable. Le prêt garanti par l’État, très bien, ça permettait d’avoir des liquidités rapidement mais il va falloir le rembourser comme les reports de charges […] Ce serait terrible de devoir fermer de nouveau… Je ne peux pas le croire. Si le gouvernement le fait, ce serait du suicide, un carnage… »
Le chef Etchebest était déjà grandement inquiet pour sa profession, il l’est encore plus aujourd’hui. Pour rappel, il révélait, il y a quelques mois, que 30% des restaurants risquaient la faillite en cas de nouvelle fermeture et que 250 000 emplois étaient menacés. Depuis les dernières annonces du gouvernement, il est remonté au créneau pour défendre sa profession :
« Les fermetures anticipées des restaurants ne vont pas freiner la propagation du virus, ce n’est pas vrai […] Il faut arrêter de stigmatiser notre profession. Nous sommes les garants du maintien des mesures. Les gens arrivent avec des masques, ils mettent du gel hydroalcoolique, il y a la distance sociale, quand ils se lèvent on leur demande de porter leur masque. Il y a une vraie sécurité dans nos établissements alors pourquoi on stigmatise notre profession ? »
Alors que 55 départements sont actuellement en zone rouge, les CHR retiennent leur souffle. La suite semble inéluctable pour les restaurateurs des autres départements qui s’attendent désormais à devoir fermer dans les semaines à venir…